Substance blanche, friable, cristallisée, transparente… Le sel habite une grande partie de l’oeuvre de Bianca Bondi. C’est en 2011, sur les hauts plateaux du Cameroun, lors d’une résidence à la Bandjoun Station (créée et développée par l’artiste Barthélémy Toguo) que l’artiste est amenée à renouer avec le sel et à tomber en amour avec cette matière. Ce sel est au coeur des rituels, disséminé dans la forêt alentour, et fait écho aux premières initiations à la magie, qu’elle pratiquait enfant afin d’entrer en connexion avec des esprits proches. Protecteur, sacré et esthétique, le sel métamorphose les objets qu’il touche de par ses propriétés chimiques. Appliqué comme un baume à la fois bienfaisant et nettoyant, le sel est versé dans l’eau où sont immergés des objets sur lesquels des cristaux se forment. Il leur confère ainsi une nouvelle vie. Rite de purification, de baptême peut-être et de renaissance.
Les objets choisis par l’artiste sont excavés des lieux où elle intervient, liés parfois à la domesticité – lit, fours, cuisine, ustensiles… – et toujours réutilisés, dans un souci d’économie écologique. Bianca Bondi créé des mondes irréels, aux allures fantomatiques, à partir d’une matière qu’elle maîtrise en partie mais où des surprises surviennent à chaque passage. En recyclant des éléments glanés sur des terrains variés ou dans des brocantes, en fabriquant ces « potions magiques » et en revisitant les possibles alchimies des couleurs, l’artiste entend insuffler des énergies particulières à ses oeuvres, développer des auras de bienveillance. Les nouvelles peaux que revêtent ses objets interrogent la pérennité et la volatilité du monde. The Wishing Well II est un hommage à l’art des fontaines et à la tradition des puits par le biais desquels on remerciait souvent les dieux avec de la monnaie, ou autres objets de valeur. Cette action de reconnaissance pouvait intervenir à la suite d’une guérison, pour célébrer l’accès à l’eau douce ou rendre grâce devant toute autre amélioration du quotidien. Dans le contexte de notre habitude consumériste de demander plus, faudrait-il penser à davantage remercier ? Ainsi ce petit tabouret abandonné dans son atelier devient une boîte à offrandes, un coffre aux trésors où sont cachés plantes et coquillages, conférant au lieu des allures baroques et des airs de grotte ésotérique.